Corporate Venture : pourquoi nous avons décidé d’accompagner les entreprises
Il y a quelques jours, Orange annonçait sa participation au financement de deux startups dans les domaines de la cybersécurité (Morphisec) et du big data (NGD Systems), via Orange Digital Ventures. Deux startups de plus pour ce fonds de Corporate Venture créé il y a 3 ans et qui compte désormais une quinzaine de participations.
A l’instar d’Orange, l’intérêt des grands groupes pour l’investissement dans les startups est donc désormais démontré : plus de 500 Corporates auraient investi dans des startups en 2017.
En revanche il semble que les pratiques de ces grands Corporates en la matière soient encore assez hétérogènes. Ceci s’explique notamment par le fait qu’il s’agit d’une discipline encore récente, qui s’est réellement développée il y a quelques années, mais aussi pour d’autres raisons :
- les objectifs poursuivis par les grands groupes dans le cadre de leur programme de corporate venture sont variables : objectifs stratégiques et financiers, modernisation de la marque, acculturation des équipes internes…
- le mode de fonctionnement du groupe et sa culture d’entreprise vont forcément impacter la manière d’opérer, par exemple sur les critères de choix des investissements ou les modalités de prise de décision,
- enfin, bien sûr, les hommes et femmes qui animent le programme de Corporate Venture, et font le lien entre les startups et le grand groupe, sont bien entendu des pièces essentielles du puzzle.
A titre personnel, après avoir contribué au rachat de plusieurs fintech pour le compte d’un groupe bancaire, et à leur suivi post-acquisition, j’ai pu aussi me rendre compte à quel point l’investissement dans une startup (qu’il soit minoritaire ou majoritaire), pouvait être bénéfique pour un groupe cherchant à se transformer et anticiper les évolutions possibles sur son marché. Soit a priori la plupart des grandes entreprises en France, qui font face à de nouvelles opportunités technologiques et de nouveaux concurrents.
Bien sûr les grandes entreprises et les startups peuvent collaborer en négociant entre elles de simples contrats commerciaux. Mais en étant impliquée dans la vie de la startup comme actionnaire, l’entreprise pourra alors plus facilement assurer une veille commerciale et technologique, imaginer le développement de nouveaux produits en partenariat avec les startups, déléguer une partie de sa Recherche et développement, acculturer ses équipes opérationnelles en développant leur esprit entrepreneurial, et tirer parti financièrement du succès de la startup le cas échéant, via dividendes et plus-values. Le Corporate Venture est aussi une manière d’investir sur de nouveaux sujets technologiques ou de nouveaux business models plus rapidement, à l’heure où la vitesse d’exécution semble l’élément clé pour éviter de se faire distancer ou absorber. Et tout cela en profitant d’un cadre fiscal avantageux, les investissements étant amortissables sur 5 ans, sous certaines conditions.
Dans les faits, les choses me semblent quand même un peu moins idylliques, car elles nécessitent une grande qualité d’exécution pour être efficaces. Si un entrepreneur souhaite faire entrer un grand groupe dans son capital, c’est souvent pour capitaliser sur ses actifs (réseau de distribution, fonds de commerce, expertise sectorielle) et pour bénéficier d’un impact business tout en conservant son agilité. Au plan opérationnel, l’enjeu est donc de s’assurer que les synergies sont bien réelles et activées dans des délais raisonnables à l’échelle de la startup. La lourdeur des processus et la lenteur des prises de décisions sont souvent reprochées aux grandes entreprises, il est primordial qu’elles ne pénalisent pas la croissance de la startup.
L’alignement d’intérêt entre les deux acteurs est donc clé pour faire face à ces enjeux et éviter que le mariage ne tourne mal, à vérifier dans toutes les étapes du processus de rapprochement :
- Premiers contacts et sélection (mutuelle) : startup et corporate ont-ils des objectifs stratégiques communs et une même vision des moyens à mettre en œuvre pour les atteindre ? Y a t-il une véritable envie de travailler ensemble, à tous les niveaux de l’entreprise (opérationnels et équipe financière notamment) ? Ont-ils une culture compatible sur le long terme ?
- Négociation du deal : les clauses négociées permettant-elles réellement un alignement d’intérêt dans le temps ? Comment l’entreprise participera-elle à la gouvernance de la startup ? Ses représentants au board seront-il bien en mesure d’apporter l’expertise nécessaire ? Seront-ils en capacité de prendre une décision quand cela sera nécessaire ? Comment sont-ils intéressés à la réussite de la startup ? Comment prendre en compte dans la structuration de l’opération le business additionnel apporté par l’entreprise ? Le rôle du corporate lors des opérations de refinancement éventuelles sont elles déjà précisées ? Le corporate a t-il un droit de préemption ?
- Gestion opérationnelle : comment s’assurer en permanence de la réalité des synergies mises en oeuvre entre startup et corporate ? Comment adapter le processus de suivi financier, de contrôle interne et de gestion du risque en fonction du niveau de participation et du stade de maturité de la startup ? Comment s’assurer que les relations startup-corporate ne pénalisent pas les co-investisseurs ?
Bien sûr, cette liste de points d’attention n’est pas exhaustive. En revanche, elle montre qu’il ne faut négliger ni l’analyse préalable à l’investissement, ni la recherche d’équilibre permanent entre acteurs, jusqu’à l’exit. De vrais challenges pour de nombreux grands groupes !
Lorsque, il y a quelques semaines, j’ai commencé à évoquer ce sujet avec David, qui gère des opérations de capital investissement depuis de nombreuses années, nous nous sommes retrouvés face au même constat et la même ambition ; faire bénéficier des clients Corporate de nos expériences en investissement et en gestion opérationnelle de structure pour faire en sorte de sécuriser chaque étape du processus. L’objectif est d »appréhender chaque deal avec une vision moyen / long terme et un apport de valeur pour l’investisseur et pour l’entrepreneur. Faire en sorte que les conditions d’un bon deal soient réunies, et permettre aux Corporate de s’appuyer sur les meilleures pratiques.
C’est ce qui nous a amenés à créer Techmind 😊